Le seul endroit où le prix n’a pas flambé: bienvenue dans le building miracle de 27 étages où “on paie l’électricité au prix de 2020 jusqu’en 2023”

Face à la flambée, de spectaculaires solutions énergétiques existent : la preuve dans cet immeuble de 27 étages.

En 2019, le kilowattheure était à 18 cents. Il est maintenant à 30 cents minimum, parfois largement plus (jusqu’à 45 cents TTC). En trois ans, le prix de l’électricité a donc explosé. Sauf ici : dans ce building bruxellois.

Insensible à la flambée, le tarif n’y a plus varié depuis le 1er janvier, et n’évoluera pas avant avril 2023 au plus tôt. Depuis l’hiver et pendant neuf mois encore, le kWh est – et restera – à 25 cents, quels que soient l’inflation et les prix du marché. Et même en deçà la nuit et le week-end : 22 cents.

Et quand les nouveaux tarifs seront fixés, l’an prochain, ils le seront par les copropriétaires eux-mêmes, lors d’une assemblée générale.

Ce building miracle, nous l’avons trouvé aux 27 et 27A de l’avenue Marius Renard, à Anderlecht. Vingt-sept étages, 351 appartements, un bon millier d’habitants où un projet se réalise depuis l’an passé.

Un projet pour l’heure unique en Belgique : il consiste à combiner trois techniques d’autoproduction d’électricité verte, l’une d’elles développée à Gosselies par une filiale du constructeur d’avions légers Sonaca. Explications.

  1. En chaufferie, le building a fait installer une unité dite de cogénération qui, avec du gaz, fabrique de la chaleur et de l’électricité. Les chaudières conventionnelles produisent de la chaleur. Ici, le système, appelé cogénérateur, fabrique, en outre, de l’électricité : 1,2 gigawattheure par an. Vingt pour cent de cette électricité sont utilisés, gratuitement, pour le fonctionnement des installations communes du bâtiment comme les éclairages, les ascenseurs, les portes de garage, etc. C’est le premier procédé.
  2. Le building dispose d’une toiture de 7 000 mètres carrés sur laquelle seront installés 202 panneaux photovoltaïques. Le choix s’est porté sur des panneaux de la dernière génération, un modèle conçu pour produire de l’électricité même si une partie du panneau n’est pas ensoleillée. On estime que les 202 photovoltaïques produiront 50 000 kWh supplémentaires par an. C’est le deuxième procédé.
  3. Le troisième, c’est le vent qui souffle. À travers sa filiale Renowind, Sonaca a développé une machine dont elle détient le brevet mondial. Placée dans un caisson d’1m80 sur 2m50, la machine, sensible au moindre souffle, est équipée d’un rotor actionné par les vents ascendants qui montent le long des 113 mètres de la façade ouest de l’immeuble, la mieux exposée. Le prototype a été installé pendant l’hiver. Il donne entière satisfaction. La copropriété a décidé d’en commander 24. Ils produiront de l’ordre de 45 000 kWh.

« Et tout cela ne coûte rien aux copropriétaires dans la mesure où chacun des nouveaux investissements est financé par les revenus générés par les précédents : par la cogénération qui fonctionne depuis 2018, par les revenus de la communauté énergétique et par l’électricité autoproduite par l’immeuble et revendue aux habitants ayant adhéré au projet. »

Ce couple habite au dix-huitième étage. Entre janvier et mai 2022, il a consommé 861 kWh. 82 % de cette électricité, soit 708 kWh, lui ont été fournis en autoproduction par le building qui les lui a facturés à 25 cents – à la place des tarifs largement plus élevés pratiqués par les fournisseurs, selon les cours du marché.

Le projet est piloté par la société de syndic Managimm, qui gère le bâtiment. Son responsable, Vincent Spruytte, est enthousiaste. « Nous administrons une vingtaine de copropriétés qui, additionnées, produisent de l’ordre d’1 mégawatt d’énergie verte toutes les heures. Dans le même temps, la centrale nucléaire de Doel 1 en produit 433. Faites le calcul : à l’échelle de la région bruxelloise, nous pourrions tout simplement obtenir, si tout le monde s’y mettait, carrément la puissance d’un réacteur nucléaire. »

« Ici, les revenus ne vont pas dans la poche des fournisseurs »

Et c’est maintenant possible, poursuit Vincent Spruytte, grâce à la nouvelle directive européenne 2019/944 retranscrite chez nous tout récemment, le 17 mars 2022. « L’Europe a voulu rendre le consommateur actif de la transition énergétique. Et c’est ce que nous réalisons avec ce building. Les revenus sont directement réinvestis dans la copropriété au lieu d’aller dans la poche des fournisseurs. »

M. Spruytte voit déjà plus loin. Dans ses calculs, l’énergie verte autoproduite par le building pourrait excéder les besoins de consommation sur place. Non seulement le building deviendrait autosuffisant, mais l’excédent, à la place d’être injecté dans le réseau, serait revendu, dans un rôle social, à un prix inférieur au marché, à des écoles, des piscines, des collectivités.

Nous en avions parlé l’an passé (DH 17/11/21). Il se réalise très concrètement. Très sollicité, Vincent Spruytte organise parfois des visites sur place. Ajoutons que si le projet n’est pas imposé aux habitants, locataires ou propriétaires d’appartements, de plus en plus y adhèrent : au dernier comptage, 138 sur les 351 ménages. Précisons, enfin, qu’il n’est pas nécessaire de disposer d’un immeuble aussi élevé.

Gilbert Dupont – Publié le 05-07-2022 – Copyright © DHnet

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